La transmission d’une entreprise se prépare en amont pour qu’elle soit un levier de croissance et une source de valorisation du patrimoine. Cette transmission peut prendre plusieurs formes dont une transmission des titres en démembrement de propriété. Dans ce cas, la propriété des titres sera divisée en deux : la nue-propriété d’un côté et l’usufruit de l’autre. Exentys vous explique ce procédé à connaître lors d’un projet de transmission d’entreprise.
Comment transmettre une entreprise ?
Vous disposez de plusieurs options pour transmettre votre entreprise. La transmission peut être :
- à titre gratuit (succession, donation, donation-partage, etc.) ;
- à titre onéreux ;
- en pleine propriété ou en démembrement de propriété ;
- cession du fonds de commerce, d’une partie des titres ou de la totalité des titres.
Le mode de transmission va dépendre de la qualité du repreneur : un repreneur externe, des salariés, vos enfants, etc.
Lorsque vous souhaitez transmettre votre entreprise à vos enfants, le choix à privilégier est le démembrement de propriété afin d’optimiser la vente et sa fiscalité.
Comment transmettre une entreprise en démembrement de propriété ?
Commençons par comprendre le fonctionnement du démembrement de propriété avant de découvrir les différentes méthodes disponibles.
Démembrement de propriété : définition
Le démembrement de propriété divise la pleine de propriété en trois :
- l’usus : le droit d’utiliser le bien ;
- l’abusus : le droit de disposer du bien.
- le fructus : le droit de percevoir les fruits ;
L’usufruitier obtient l’usus et le fructus, alors que le nu-propriétaire a l’abusus.
En revanche, ni l’usufruitier ni le nu-propriétaire ne peuvent vendre le bien démembré seul, c’est-à-dire les titres de la société. En effet, l’accord des deux est requis pour céder la pleine propriété.
Le démembrement de propriété prendra fin au décès de l’usufruitier. Le nu-propriétaire deviendra l’unique propriétaire des titres qui avaient été démembrés sans devoir payer de droits de succession.
Ainsi, le démembrement permet-il de préparer votre transmission d’entreprise, tout en conservant le contrôle de celle-ci. En pratique, vous pouvez donner la nue-propriété des titres à vos enfants et conserver l’usufruit.
Le démembrement de propriété vous donne la possibilité de profiter des abattements sur les droits de donation. En effet, les donations entre parent/enfant bénéficient d’un abattement de 100 000 euros par parent et par enfant. Cet abattement est renouvelable tous les 15 ans.
Par ailleurs, dans le cadre d’un démembrement, les droits de donation sont réduits puisqu’ils sont calculés sur la valeur de la nue-propriété. Celle-ci dépend de votre âge au jour de la donation.
Tableau récapitulant la valeur de la nue-propriété selon l’âge du donateur
Âge du donateur |
Valeur de la nue-propriété |
Moins de 21 ans | 10 % |
De 21 à 30 ans | 20 % |
De 31 à 40 ans | 30 % |
De 41 à 50 ans | 40 % |
De 51 à 60 ans | 50 % |
De 61 à 70 ans | 60 % |
De 71 à 80 ans | 70 % |
De 81 à 90 ans | 80 % |
À partir de 91 ans | 90 % |
Les différentes méthodes de démembrement pour transmettre une entreprise
En tant que chef d’entreprise, vous avez donc la possibilité de transmettre votre entreprise à vos enfants à l’aide du démembrement de propriété des parts sociales ou actions.
La méthode la plus classique consiste à donner la nue-propriété des parts à vos enfants. Toutefois, il est préférable de faire plusieurs donations successives afin de :
- préparer l’entrée de vos enfants dans la société ;
- profiter de l’abattement de 100 000 euros renouvelable tous les 15 ans ;
- garder le contrôle de la société.
Cette solution peut sembler compliquée si un seul de vos enfants compte reprendre votre société. Dans ce cas, la première étape consiste à transmettre la nue-propriété des titres de votre entreprise à vos enfants à l’aide d’une donation-partage.
Ensuite, vos enfants pourront apporter les titres à une holding dont ils recevront la pleine propriété. Ainsi, vos enfants ne reprenant pas l’entreprise pourront prendre part à la transmission. Cette solution permet de diminuer grandement le coût fiscal de la transmission et d’éviter le statut de l’indivision.
Une fois l’apport des titres à la holding, il sera possible de céder l’usufruit à la holding. Dans ce cas, des droits d’enregistrement de 0,10 % seront dus. Cette dernière étape facultative, vous donne la possibilité d’avoir un capital et des liquidités.
À noter
Il est possible de profiter du Pacte Dutreil dans le cadre d’un démembrement de propriété. > Consultez notre article dédié.
Transmission d’entreprise et usufruit : qui obtient la qualité d’associé dans le cadre d’un démembrement de propriété ?
En principe, l’usufruitier n’est pas un associé de la société. C’est le nu-propriétaire qui est l’associé. Néanmoins, l’usufruitier doit pouvoir provoquer une délibération des associés sur une question ayant une incidence directe sur son droit de jouissance.
De ce fait, en tant qu’usufruitier, vous ne posséderez pas les droits et devoirs des associés tels que :
- le droit de poser des questions écrites ;
- le droit d’exercer une action sociale ;
- le droit de demander la révocation judiciaire du gérant ;
- l’obligation aux dettes sociales.
De ce fait, vous devrez veiller à toujours conserver au moins un titre en pleine propriété pour conserver vos prérogatives d’associé.
Bon à savoir
Les statuts peuvent étendre les clauses applicables aux associés aux usufruitiers. Par exemple : la clause d’agrément.
Qui entre l’usufruitier et le nu-propriétaire participe aux décisions collectives ?
Les deux ! L’usufruitier et le nu-propriétaire doivent être convoqués aux décisions collectives. En effet, en tant qu’usufruitier, vous aurez le même droit à l’information que le nu-propriétaire.
Qui exerce le droit de vote en cas de démembrement de propriété ?
Le droit de vote appartient au nu-propriétaire, sauf en ce qui concerne l’affectation des résultats. Dans ce dernier cas, c’est l’usufruitier qui vote.
A noter
Dans les sociétés par actions, l’usufruitier vote dans le cadre des assemblées générales ordinaires (AGO) et le nu-propriétaire, dans les assemblées générales extraordinaires (AGE).
Ainsi, en tant que chef d’entreprise, lorsque vous transmettez la nue-propriété des titres de votre entreprise, il vous faut revisiter la clause relative à la répartition des droits de vote pour pouvoir voter en dehors de l’affectation des résultats ou des AGE.
En effet, les statuts peuvent donner les droits de vote à l’usufruitier le temps que le nu-propriétaire demeure convoqué aux assemblées.
Néanmoins, pour éviter de telles problématiques, il est tout à fait possible de procéder à des transmissions successives des titres. Ainsi, vos enfants seront progressivement intégrés à la société et vous conserverez le contrôle de celle-ci.
Comment répartir les dividendes entre le nu-propriétaire et l’usufruitier ?
Puisque l’usufruitier a le droit d’user et de percevoir les fruits, il doit percevoir les dividendes prélevés sur le résultat de la société et sur le résultat exceptionnel (par exemple, la cession d’un actif immobilisé). Ainsi, continuerez-vous à profiter des revenus de votre entreprise.
Toutefois, il est possible de prévoir un quasi-usufruit dans les statuts ou lors d’une assemblée générale. Dans ce cas, vous disposerez des sommes provenant du résultat exceptionnel à charge de restituer une créance de restitution égale aux sommes perçues à la fin de l’usufruit aux nus-propriétaires, c’est-à-dire à vos enfants.
Quant à la distribution des réserves, les chambres de la Cour de cassation ne sont pas d’accord. La première estime qu’elle constitue une distribution par anticipation de capital social. Il conviendrait alors de reporter le démembrement sur la distribution. Dans cette situation, en tant qu’usufruitier, vous percevriez l’intégralité des sommes et le nu-propriétaire deviendrait titulaire d’une créance de restitution. Quant à la deuxième chambre, elle a jugé que la distribution devrait revenir au nu-propriétaire.
Pour rappel, les réserves sont des sommes prélevées sur les bénéfices et affectées à l’entreprise.
Qui est redevable de l’impôt dans les sociétés relevant de l’impôt sur le revenu ?
Pour rappel, les résultats d’une entreprise à l’impôt sur le revenu sont directement imposés entre les mains des associés, que les résultats soient distribués ou non.
De ce fait, en tant qu’usufruitier, vous serez imposé sur le résultat courant et vos enfants sur le résultat exceptionnel. Néanmoins, il est possible de prévoir une convention aménageant les redevables de l’impôt.
En revanche, les déficits reviendront à vos enfants nus-propriétaires. Toutefois, le Conseil d’État estime que l’usufruitier peut déduire le déficit correspondant à ses droits.
Bon à savoir
Lorsque vous voulez vendre vos titres, la donation des titres préalablement à la cession peut être effectuée en pleine propriété ou avec réserve d’usufruit. Cette donation permet de purger la plus-value latente sur les titres données afin de réduire l’impôt dû lors de la cession. En effet, au moment de la cession, le prix retenu sera le prix au jour de la donation. Si vous reportez l’usufruit sur le prix de cession, vous percevrez le prix de cession, mais aurez une dette de restitution d’égal montant au profit des nus-propriétaires.
Contactez les équipes d’Exentys pour comprendre les enjeux de démembrement de propriété et commencer à prévoir la transmission de votre entreprise.
Transmission d’entreprise et usufruit